L’Europe de la défense : un danger pour la paix et la fraternité des peuples
- Le 06/05/2022
- Dans International
Une politique européenne de défense se développe progressivement, en lien avec l’OTAN. Le traité de Maastricht a créé une politique étrangère et de sécurité commune (PESC). Celle-ci est devenue la politique européenne de sécurité et de défense (PESD) avec le traité de Lisbonne.
RAPIDE HISTORIQUE DE LA POLITIQUE EUROPEENNE DE DEFENSE
La PESD a été déclarée opérationnelle en décembre 2001. En 2003, les Accords de Berlin Plus ont formalisé les relations entre l’OTAN et l’UE. Ils donnent à l’UE un accès aux moyens de l’OTAN pour des opérations dirigées par l’UE et dans lesquelles l’OTAN dans son ensemble n’est pas engagée. C’est dans ce cadre que l’UE est intervenue en Macédoine et en Bosnie Herzégovine.
En août 2016, la France et l’Allemagne ont proposé un «Pacte européen de sécurité» visant à relancer la politique de sécurité et de défense commune. Ce pacte, soutenu aussi par l’Italie et l’Espagne, contenait trois axes : une coopération accrue en matière de défense (mise en œuvre de la Coopération Structurée Permanente), le développement de nouvelles capacités de défense, le renforcement du caractère opérationnel des capacités militaires de l’UE.
L'IMPERIALISME U.E ET FRANCAIS EN AFRIQUE
Les possibilités de coopérations militaires qu’offre l’UE sont aussi des outils précieux pour les impérialistes de notre pays pour maintenir la domination et l’emprise sur des marchés déjà acquis, notamment en Afrique. Ainsi, en 2008 et 2009, c’est en tant que Force Opérationnelle, commandée par l’UE, que 1700 militaires français, dans une force totale de 3700 hommes (fournis par d’autres pays membres), ont participé à l’opération EUFOR Tchad/RCA. Cette opération avait pour but annoncé la sécurisation de camps de réfugiés et de la frontière entre le Darfour, le Tchad et la Centrafrique. Encore une fois, l’Union Européenne et la France se sont drapées du maintien de la paix mondial.
Ces impérialistes ont profité du soutien du Conseil de sécurité des Nations unies au travers d’une résolution sur le sujet et qui en réalité leur permettait de déployer des troupes directement sur le terrain, en plein milieu d’un des plus gros nœuds inter-impérialistes du continent africain. Notons d’ailleurs qu’après la fin de l’opération militaire, la France va être accusée d’avoir profiter de cette intervention « humanitaire », pour sécuriser principalement la position du président du Tchad, Idriss Déby, menacé alors par une opposition armée, dont les bases opérationnelles se situaient au Soudan et en Centrafrique.
Si l’on ajoute à ça la participation « passive » de la France à la bataille décisive à N’djamena, au Tchad, où les soldats français n’ont fait « que » protéger l’aéroport de la ville (d’où partaient les hélicoptères de l’armée tchadienne, décisifs dans la bataille), on rend bien compte qu’ici la France n’a pas fait que profiter de cette Opération européenne. C’est bien un nouvel argument contre les sociaux-chauvins et les nationalistes qui conspuent l’UE parce qu’elle écraserait la souveraineté de la France, au profit de l’Allemagne ; en réalité la bourgeoisie impérialiste française se porte très bien, et ce sont même les citoyens de tous les pays membres de l’UE qui payent pour que ses intérêts soient protégés.
LA MISE EN PLACE PROGRESSIVE D'UNE ARMEE EUROPEENNE
Pour l’heure, les armées de l’UE restent sous le commandement respectif de leurs pays, même dans le cadre de missions mandatées par l’UE. Mais depuis l’automne 2018, les chefs d’État français et allemand mettent en avant l’idée de mettre en place une armée européenne, comme l’a révélé le discours d’Emmanuel Macron à ce sujet.
Quels bénéfices les grandes puissances impérialistes de l’Union Européenne, soit la France et l’Allemagne, pourraient en tirer ? La mise en place d’une armée européenne représente notamment l’ouverture de nouveaux marchés pour les industriels français, comme en Pologne, pays qui aujourd’hui achète majoritairement son équipement militaire auprès des USA. La construction européenne de la Défense permettrait d’uniformiser les équipements et matériels militaires fournis par des monopoles industriels français ou allemand, au détriment d’équipementiers américains. Rappelons par ailleurs que les principaux producteurs et vendeurs d’armes dans le monde sont européens (France, RoyaumeUni, Allemagne, Suède, Italie…) et que les avancées dans le domaine spatial (programme Ariane, EADS) rendent possible la construction d’une puissant complexe militaro-industriel.
Cet intérêt de développement industriel transparaît à travers de la phrase du président français Emmanuel Macron lorsque ce dernier répond à l’exhortation de l’ex président Donald Trump aux pays membres de l’UE d’augmenter leurs dépenses militaires : « Je ne veux pas voir les pays européens augmenter le budget de la défense pour acheter des armes américaines ou autres, ou des matériels issus de votre industrie », déclaration suivie par « si nous augmentons notre budget, c’est pour bâtir notre autonomie ». L’autonomie désigne ici les industries française et allemande, qui se sont liées récemment pour la production d’un char et d’un avion de chasse européens.
En prétextant souhaiter renforcer la sécurité intérieure et la protection des frontières de l’UE, le Parlement européen a approuvé en mars 2018 une enveloppe d’un demi-milliard d’euros pour le développement d’équipements dans le secteur de la défense pour 2019 et 2020, subvention s’ajoutant aux 90 millions accordés l’année dernière à la recherche militaire. L’objectif, clairement énoncé par la Commission Européenne, est la création d’un fonds de défense européen de 5,5 milliards d’euros par an pour « stimuler les capacités de défense européenne » à partir de 2021. L’UE accorde également aux industriels de l’armement le droit de tester des armes au sein de son territoire : ainsi, l’un des premiers projets financés par l’UE, Ocean 2020, permettra à l’entreprise Safran de tester ses drones en milieu maritime européen, drones qui pourront en outre servir l’armée européenne envisagée.
La mise en ordre d’une armée européenne se veut être financée par l’ensemble des pays membres de l’UE, cependant nous pouvons affirmer qu’elle sera contrôlée de fait par les plus gros impérialistes de l’Union, à savoir la France et l’Allemagne. En effet, comme nous l’avons déjà souligné plus haut, la majorité des interventions militaires sous pavillon européen qui ont eu lieu depuis la fin de la guerre de Yougoslavie ont eu lieu en Afrique, et majoritairement dans des pays qui abritent des intérêts capitalistes français. Cette armée permettrait donc à l’État français de disposer d’outils supplémentaires pour amplifier son impérialisme, notamment en Afrique de l’Ouest.
Néanmoins, le projet d’armée européenne est à envisager dans un temps long. Ni les industries militaires nationales, ni les industries USA-OTAN ne se laisseront absorber facilement par l’uniformisation des matériels issus des groupes français ou allemands. Des pays comme les Pays-Bas ou la Pologne ont par ailleurs ostensiblement indiqué qu’ils disposaient déjà d’une protection américaine suffisante.
LE FONDS EUROPEEN DE LA DEFENSE
Le fonds européen de la dépense, que nous évoquons plus haut, est un projet pour l’instant plus réaliste, et dont la mise en œuvre est déjà déclenchée. Ce fonds, financé par l’ensemble des pays membres de l’Union Européenne, a pour but de financer des entreprises de l’armement, dans la recherche et le développement de nouveaux produits, et sera doté de 13 milliards d’euros. Le but qui ressort de ce projet, c’est d’abord de permettre aux industriels de la défense de financer leurs projets. Ensuite, cela apparaît comme une injonction des pays impérialistes de l’Union, les plus avancés militairement, pour forcer les autres pays à investir dans l’industrie de leur propre pays. Ainsi, des groupes comme Dassault, qui travaille aujourd’hui notamment pour l’Etat français, ne seraient plus exclusivement financés par celui-ci, mais aussi par l’ensemble des pays membres, et ce, pour son propre bénéfice. Ainsi, ajouté au projet d’armée européenne, les pays les moins avancés de l’Union seraient incités à investir dans les entreprises françaises, puis forcés à en acheter la production.
Ce projet révèle bien les logiques à l’œuvre au sein de l’Union Européenne, qui prétend maintenir une paix factice entre les États-membres tout en s’impliquant indirectement dans des guerres visant à assouvir les intérêts des puissances impérialistes, ce projet ayant franchi une étape supplémentaire par la création d’un fonds de défense et le projet de création d’une armée européenne. L’Union Européenne n’a jamais été une union des peuples pour la paix, elle a en revanche toujours été et sera toujours un outil impérialiste au service des bourgeoisies européennes pour accroître le niveau d’exploitation, de plus-value, de profit, et cela aussi bien au sein des limites de l’UE, que dans le monde entier.
CONCLUSION : VERS UNE GUERRE IMPERIALISTE GENERALISEE
Enfin, pour conclure, il ne faut pas oublier que, si nous avons démontré les tensions présentes en son sein, l’OTAN intègre en son sein la majeure partie des pays de l’Union Européenne. Ces pays participent ainsi à la préparation de la prochaine grande guerre impérialiste inévitable. Si les différents impérialismes, Américain, Français, Allemand ou Britannique cherchent à tirer leur épingle du jeu en matière d’armement, ils n’en restent pas moins que pour le moment, tous sont d’accord pour se liguer contre l’impérialisme russe. Ainsi, les exercices Trident Juncture, déployés en Automne 2018 en Norvège, en sont la preuve flagrante : tous ces pays ont participé, à hauteur différente, à ces exercices militaires, dont le but est l’entraînement des troupes OTAN en milieu humide et marécageux (c’est à dire, comme la frontière nord de la Russie).
La construction du système de bouclier antimissile en Pologne et en Europe orientale, le déploiement milliers de soldats américains, français, allemands, britanniques à la frontière occidentale de la Russie, l’intégration de la Macédoine dans le bloc OTAN, la mise en place de sanctions économiques contre la Russie participent à la hausse des tensions entre les différentes puissances impérialistes.
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