Quelques éléments sur la situation politique actuelle
- Le 21/12/2018
- Dans Actualité
Cela fait plusieurs semaines qu'une colère populaire, légitime s'exprime en France. Les salaires de misère, le chômage de masse, les conditions de travail sans cesse dégradée ont fait sortir du silence des dizaines de milliers de travailleurs.
Face à cette grogne qu'il avait tenté d'instrumentaliser, le gouvernement et Macron ont été contraints de réagir en annonçant des mesures ridicules. La prétendue hausse de 100€ du SMIC consiste à une baisse des cotisations sociales de 20 € et à une augmentation de la prime d’activité de 80 € (augmentation déjà prévue...). Ce n’est pas une augmentation du salaire : les patrons ne vont rien payer de plus aux salariés ! De plus, tous les smicards ne touchent pas forcément la prime d’activité qui est calculée en fonction de différents paramètres (entre autres le temps de travail, la composition du foyer et les revenus du conjoint). Quand à la baisse de 20 euros des cotisations sociales, c’est une véritable régression. C’est le but du gouvernement, nous faire croire que notre pouvoir d’achat augmente en augmentant notre salaire net alors qu’il liquide notre droit à une santé gratuite (avec la Sécu) et à un revenu de remplacement quand on est expulsé de l'emploi (assurance-chômage).
BFM et tout les autres chiens de garde du capital ne nous auront pas : personne n’a pu décider de renoncer au combat après une telle déclaration.
Qui est en lutte aujourd’hui ?
Le 17 novembre, plus de 280 000* personnes s'identifiant ‘gilets jaunes’ se mobilisent contre l’augmentation du prix de l’essence et contre les taxes en général. Le petit patronat en est, et saute sur l’occasion pour protester contre l’existence même des cotisations sociales (notre salaire indirect), en l’assimilant volontairement aux “taxes” comme la TVA.
Au départ, il n’y a pas d’homogénéité sociologique chez les “gilets jaunes” qui rassemblent sur des ronds points patrons et ouvriers. Tous ont intérêt à une baisse du prix de l’essence : le patronat pour maintenir ou augmenter ses profits, les travailleurs pour garder un minimum de pouvoir d’achat.
Le discours anti-taxe est la porte ouverte à l’idéologie libérale et réactionnaire : « les taxes sont un frein à la liberté d’entreprendre, d’exploiter » ou « les taxes c’est donner notre argent pour les pauvres et les migrants ».
Du pain béni pour l’extrême droite qui appelle massivement à la mobilisation du 17 novembre, et tente de prendre le leadership du mouvement en proclamant portes paroles du mouvements des militants d’organisations réactionnaires comme Debout la France ou Génération identitaire.
Malgré cela, ce sont massivement des ouvriers qui enfilent leurs gilets jaunes. Subissant leur condition de classe, ils expriment une réelle colère envers le système dans lequel ils vivent, contre la vie chère et contre le mépris de la classe dominante à leur égard. Le mouvement des gilets jaunes devient alors un combat contre la vie chère, pour les conditions matérielles d’existence.
Les mots d’ordres anti-taxes laissent progressivement place à ceux pour une augmentation conséquente du SMIC, pour le rétablissement de l’ISF ou la défense de la sécurité sociale. Ces revendications de classe écartent de la mobilisation le petit patronat.
D’une localité à l’autre, il y a de grosses différences revendicatives, idéologiques, sociologiques et des moyens d’action. Les drapeaux français flottent, et le mouvement prend souvent des teintes nationalistes ou patriotes ; qui n’ont pas partout la même teneur réactionnaire.
Une partie du prolétariat qui jusqu’ici n’avait jamais lutté s’est impliqué dans le mouvement. C’est une adhésion à un combat non structuré qui s’est construit hors et parfois contre les syndicats et la lutte de classe organisée.
Ce n'est pas étonnant. Cela fait des dizaines d'années que des pratiques opportunistes et défaitistes ont cours dans certains syndicats. Le développement du clientélisme, notamment à l'embauche, du corporatisme (la croyance qu'on doit se battre que dans sa boîte), l'absence totale de discussions politiques entraînent de fait la démobilisation des travailleurs et décrédibilise le syndicalisme dans son ensemble.
Les partis politiques bourgeois ne sont pas en reste. Ils distillent la résignation chez les travailleurs et s'efforcent "d'acheter" les plus revendicatifs pour faire taire la colère populaire. La gestion de la ville de Marseille ou la politique "locale" d'attribution des logements sociaux montrent bien ces pratiques mafieuses de gestion de la misère.
C'est l'objectif obsessionnel de la bourgeoisie : que la classe ouvrière adhèrent d'elle-même à son exploitation. Qu'elle consacre sa force à la collaboration de classe, c'est à dire qu'elle trahisse ses intérêts pour soutenir les intérêts de ceux qui l'exploite.
Malgré cela, parmi tous les travailleurs entrés individuellement dans cette forme de lutte, certains posent la question pratique du blocage de l’économie et du rapport de force avec le gouvernement. Une partie est allée au-delà des barrages routiers hors des temps de travail, pour bloquer des lieux stratégiques, des dépôts logistiques, en parlant de la nécessité de la grève. Quelquefois ils ont convergé avec des syndicats CGT, lors d’actions de blocage ou en cortèges lors des manifestations.
L’expérience de la lutte pour ses intérêts et ses conditions de vie amènent à la conscience de classe.
Dans les grandes villes le nombre de rendez-vous à manifester est considérable. Les manifestations convergent les samedis outrepassant largement les « gilets jaunes » à proprement parler. Le niveau de conflictualité avec la police est extrêmement élevé. La répression atteint des records (700 interpellations samedi dernier à Paris). Le gouvernement affirme que les moyens policiers déployés sont à leur maximum.
Légitime colère chez les lycéens
Le climat de contestation d’agitation urbaine pousse à la mobilisation. Depuis le 30 novembre dernier, près de 400 lycées se mobilisent dans toute la France, par des blocages totaux ou partiels de leurs établissements. A Marseille, une vingtaine d'établissements ont leurs cours perturbés, 13 ont été bloqués à plusieurs reprises.**
Les dernières réformes de l’éducation comme Parcoursup et la réforme du Bac menacent encore plus l’accès à l’enseignement supérieur pour les jeunes issus de familles et de lycées populaires. Au delà de ça, le mouvement lycéen à Marseille et en France exprime une colère généralisée face aux politiques libérales et antisociales du gouvernement et face à l'entièreté du système qui les enferme dès leur plus jeune âge dans un avenir de galère. Les lycéens ont conscience de ce qui les attend après leur Bac : la difficulté pour payer leurs études devenues trop chères, le chômage, la précarité. Les effondrements de la rue d'Aubagne sont un événement de plus qui alimente la colère des jeunes marseillais.
Face aux nombreux blocages et aux manifestations lycéennes massives (plus de 5000 lycéens dans les rue de Marseille), le gouvernement joue d’une stratégie de peur et d’intimidation. La répression n'a jamais été aussi offensive. A Marseille, dès la première semaine de mobilisation, les CRS et la BAC sont intervenus sur les blocages et dans chaque manifestation de lycéens, usant du gaz lacrymogène, de grenades de désencerclement, de flashball. De nombreux lycéens ont subis interpellations et garde-à-vues.
Blocage de lycées, blocage de rond-point, quelle prochaine étape ?
Pour gagner réellement des droits nouveaux, pour arracher à la bourgeoisie des augmentations de salaires, des meilleures conditions de travail, c'est de créer le rapport de force face à la bourgeoisie. Celle-ci ne se laissera jamais émouvoir par la misère, la dureté des conditions de vie et de travail des travailleurs. Elle ne perdra jamais une occasion de les humilier et de les faire taire à coups de matraques.
Pour que la peur change de camp, la classe ouvrière a toujours eu besoin de s'organiser et de définir collectivement les modalité de ses luttes. Arrêter collectivement le travail stoppe la production et la distribution et attaque les profits des exploiteurs. Lorsque que la grève est organisé collectivement, et non décrétée par le haut, elle permet aux travailleurs de se réunir et de s’organiser. On voit d'ailleurs se multiplier les piquets de grève pour s'assurer de la fermeture de l'entreprise lors de l'arrêt de travail et permettre de réelles discussions politiques et stratégiques entre les grévistes.
Il n'y a pas de solution miracle pour déclencher des grèves massives dans les entreprises. Tout ceux qui attendent bêtement un appel à la grève générale reconductible venu d'en haut ne comprennent pas, ou ne veulent pas comprendre, que ce rapport de force se construit sur le terrain et que c'est un travail difficile et de longue haleine.
La période actuelle s'annonce difficile car la bourgeoisie veut aller trop loin, trop vite et trop fort. L'espoir réside dans la capacité de la classe ouvrière à s'organiser elle-même et a organiser la lutte contre le système capitaliste pour satisfaire les besoins sociaux. Elle doit se battre pour ses revendications immédiates et, dans le même temps, organiser consciemment les travailleurs à prendre le pouvoir des mains de cette bourgeoisie assassine et construire une nouvelle société débarassée de l'exploitation et de la misère, le socialisme.
Par la lutte organisée, construisons dès maintenant la victoire !
POUR LA RÉVOLUTION
POUR LE SOCIALISME
ORGANISE TA COLÈRE !
* selon le Monde
**Montgrand, Thiers, Victor Hugo, Saint-Charles, Saint-Exupéry, Daumier, Marie-Curie sont rejoints par d'autres, moins coutumiers des mobilisations lycéennes comme des lycées professionnels (L'Estaque, Blaise Pascal...).
socialisme syndicat organisation grève lutte