Oui nous avons virés Nous Vivrons, Non nous ne sommes pas antisémites. La gauche, la Palestine, l'impérialisme et nous.
- Le 18/03/2025
- Dans Actualité
Nous relayons le communiqué commun des organisations communistes des Bouches-du-Rhône - Ligne Rouge 13, Jeunesse Communiste des Bouches-du-Rhône, URC-ANC 13 - en réaction à la tentative du collectif sioniste Nous Vivrons, défendu par une partie de la gauche y compris le PCF, d'imposer sa présence à la manifestation de la journée internationale du 8 mars des luttes pour les droits des femmes travailleuses.
Le 8 mars dernier, avec d'autres militantes et militants, des camarades de nos organisations ont participé à virer le cortège Nous Vivrons de la manifestation. Celle ci descendait la Canebière pour rejoindre le rassemblement féministe, antiraciste et anticolonial qui se tenait sur le Vieux Port.
Nous Vivrons est un collectif créé le lendemain du 7 octobre 2023. Ce collectif qui se revendique sioniste milite pour la criminalisation de l'antisionisme en France, qu'il présente comme un faux-nez de l'antisémitisme car ce serait remettre en cause “l'existence d'Israël” et donc le droit à l'autodétermination du peuple juif. C'est un crachat à la figure de plusieurs générations de juifs révolutionnaires, antisionistes le plus souvent, qui se sont battus pour une véritable droit à l'autodétermination sans l'associer à un projet colonial, ce que le sionisme a toujours été.
Rappelons que même en Israël des formations politiques antisionistes existent.
Nous Vivrons prétend également militer pour la création d'un État palestinien et dit être en faveur de la paix. Pour autant nulle trace de condamnation de la part de ce collectif du génocide en cours à Gaza ni du nettoyage ethnique en Cisjordanie, et encore moins de la colonisation et de l'apartheid israéliens.
Au contraire, toutes les actions de Nous Vivrons ont été orientées contre les mouvements de solidarité avec la Palestine, y compris en empêchant ou en perturbant des événements de commémoration de la Shoah organisés par le collectif juif décolonial Tsedek ! et l'UJFP.
Nous Vivrons participe activement à la campagne de criminalisation de toutes les voix de solidarité avec la Palestine, juives ou non, antisionistes ou non.
Nous Vivrons est un relai de la propagande de l'État colonial, dont il a relayé toutes les fake news et n'a jamais condamné les agissements.
Nous Vivrons est également un relais du gouvernement français, et est ouvertement soutenu par Aurore Bergé, qui n'a jamais caché son islamophobie et sa transphobie. Il travaille également avec des groupes racistes et réactionnaires comme le Printemps républicain ou Femme Azadi.
Nous Vivrons est tout sauf un collectif féministe et antiraciste.
Pourtant dès le 9 mars un certain nombre de collectifs et d'organisations marqués à gauche, se réclamant du féminisme et de l'antiracisme, ont publié une tribune “à nos sœurs juives”. Dans cette tribune, elles dénoncent de supposés agissements antisémites de la part des participantes et participants aux marches féministes qui se sont opposés à la présence de Nous Vivrons, et ce parfois au prix de la répression policière.
A Marseille c'est l'adjointe municipale à l'égalité femmes hommes et à la lutte contre les discriminations et violences faites aux femmes, Nathalie Tessier, élue PCF, qui s'est interposée aux côtés de la police contre les militantes venues s'opposer à la présence de Nous Vivrons.
Premièrement les auteurs de cette tribune prétendent s'adresser à toutes les femmes juives, comme si Nous Vivrons avait un monopole de la représentation des femmes juives de France. Cette essentialisation est dangereuse et antisémite.
Deuxièmement, à aucun moment la judéité des militantes et militants de Nous Vivrons n'a été le problème ou n'a motivé aucune action à leur encontre. Encore une fois cette essentialisation permet de masquer la réalité : Nous Vivrons est un collectif sioniste militant et tant que tel s'oppose activement à toute expression antisioniste, réelle ou supposée (LFI, qui pourtant n'est pas antisioniste, est une cible préférée du collectif). Une partie de la gauche s'émeut donc du fait que des militantes et militants antifascistes et anticolonialistes s'opposent à la présence d'un collectif qui milite pour la répression de leurs luttes !
Ces organisations et personnalités “progressistes” se seraient-elles émues si des collectifs féminins de droite et d'extrême droite avaient été exclus de manifestations féministes de gauche ? Quand il s'agissait de Némésis, cela faisait pourtant consensus.
Nous Vivrons instrumentalise la lutte légitime contre l'antisémitisme comme le fait le gouvernement français et de toutes les forces politiques réactionnaires en France comme ailleurs. Ils instrumentalisent cette lutte comme ils instrumentalisent celle contre le sexisme à des fins de répression policière, racistes et coloniales.
Ainsi l’un des slogans de Nous Vivrons est ainsi “de la mer au Jourdain, les femmes seront libres”. L'un des arguments préférés de la propagande israélienne est que l'armée d'occupation libère les femmes palestiniennes de Gaza et de Cisjordanie du Hamas islamiste. C'est une justification du génocide et de la colonisation. C'est une insulte aux centaines de milliers de femmes palestiniennes emprisonnées, torturées, violées, assassinées par le régime colonial sioniste depuis 1948.
L'idée qu'il faudrait libérer les femmes arabes de la tyrannie islamique est une vieille rengaine de la colonisation occidentale. Les mêmes arguments étaient utilisés hier en Algérie française pour réprimer et contrôler les corps des femmes indigènes.
Oui, le sionisme est une idéologie nationaliste, coloniale et raciste. Non, il n'est pas un projet d'émancipation pour les juives et les juifs, dont il nie l'identité plurielle.
Non on ne peut décemment venir manifester un 8 mars aux côtés d'organisations qui luttent pour l'émancipation des peuples non seulement en soutenant ouvertement une telle idéologie mais en plus en voulant interdire les voix qui s'y opposent.
Celles et ceux qui à gauche refusent de voir cela se déshonorent eux mêmes.
La réalité est qu'une partie non négligeable de la gauche a glissé sur les thématiques racistes de la bourgeoisie impérialiste française au nom de “l'universalisme républicain”. Fabien Roussel, secrétaire national du PCF, a ainsi soutenu l'interdiction de l’abaya. Il a également condamné sans réserve le 7 octobre, parlant de “pogrom”.
C'est un recul historique. En 2004, le PCF s'opposait à loi interdisant les signes religieux ostentatoires dans les établissements scolaires, pointant justement que les usagers du service public ne sauraient être soumis aux mêmes obligations que les fonctionnaires et soulignant les risques de discrimination raciale et religieuse qui résulterait de l'application concrète de la loi. Comme prévu, cette loi a en effet ciblé presque exclusivement les personnes juives et musulmanes.
Dans les années 1970-1980 il se trouvait seul à défendre Nelson Mandela, le dirigeant de la branche armée de l’ANC, qualifiée alors de “terroriste” par l'Occident. Sur la Palestine, le PCF a historiquement soutenu l'organisation de libération de la Palestine, y compris quand elle menait des opérations armées contre le colon israélien. La campagne de soutien à Marwan Barghouti et à tous les prisonniers politiques, à laquelle de nombreux de nos militants ont participé quand nous étions encore liés à ce parti et à son organisation de jeunesse (MJCF), est un reste de ce positionnement internationaliste. Marwan Barghouti incarne l'unité de toutes les composantes de la Résistance palestinienne. Il s'est opposé à la division Fatah-Hamas, il a refusé de déposer les armes après les accords d'Oslo et ce alors qu'il était le chef de la branche armée du Fatah. Depuis sa prison, il continue de prôner l'unité de toutes les forces de Résistance et lie son sort à TOUS les prisonniers politiques, quelle que soit leur affiliation partisane.
Comme pour la libération de Georges Ibrahim Abdallah, on ne peut réclamer la libération des prisonniers politiques palestiniens en condamnant en même temps leur Résistance, en répandant les mensonges de l'armée d'occupation sur le 7 octobre, en renvoyant dos à dos colonisés et colonisateurs, en prétendant faire le tri entre les composantes de la Résistance du peuple palestinien. Ou en soutenant la soi-disante “Autorité palestinienne” qui n'est aujourd'hui plus qu'un supplétif de l’Occupation. Cela ne vaut d'ailleurs pas seulement pour le PCF mais pour toute la gauche dite de “rupture”, LFI comprise.
Enfin on ne peut pas ne pas lier les graves défaillances de la gauche française dans la solidarité avec la Palestine avec ses manquements tout aussi graves dans l'opposition à la marche à la troisième guerre mondiale.
Aucune force politique au Parlement ne s'oppose clairement à l'augmentation des dépenses militaires, à l'envoi d'armes en Ukraine, à la militarisation de l'Europe, à l'élargissement de l'OTAN. Ainsi si LFI et le PCF ont majoritairement voté contre la dernière résolution de soutien à la guerre impérialiste en Ukraine ; ils ne s'opposent pas par principe à l'augmentation du budget militaire et aux funestes projets d' “Europe de la défense”, ni ne proposent une sortie immédiate des alliances impérialistes que sont l'OTAN et l'UE. Par le passé, ils ont d'ailleurs voté d'autres résolutions pro-guerre à l'Assemblée nationale et au Parlement européen.
De manière générale, la recomposition politique qui est en cours à gauche depuis 2022 et la NUPES se fait sous les auspices d'une ligne d'accompagnement et de collaboration de classe, et non de rupture et d'affrontement avec le capital. Et ce alors que l'offensive réactionnaire est plus aiguë que jamais.
Aux communistes sincères qui sont encore dans le PCF et le MJCF nous posons cette question : allez vous laisser votre direction nationale et vos élus fouler aux pieds tout ce qui reste d'internationalisme dans vos organisations ? Nous savons que nombre d'entre vous s'impliquent quotidiennement pour la solidarité avec la Palestine, fidèles à votre histoire et à vos principes.
Nous ne faisons pas le tri dans les militants ouvriers et anti-impérialistes sincères. Aussi nous invitons toutes celles et ceux qui souhaitent construire une véritable opposition aux guerres impérialistes et coloniales à se saisir là où ils peuvent de leurs organisations, politiques et syndicales.
Imposons partout des mots d'ordre de soutien clair à la résistance des peuples contre l'impérialisme et le colonialisme ! Refusons la fracturation raciste de notre classe ! Refusons l'implication de notre pays dans les alliances impérialistes et leurs guerres !
Signatures :
- Ligne Rouge 13
- Jeunesse Communiste des Bouches-du-Rhône
- Union pour la Reconstruction Communiste - Association Nationale des Communistes 13
8 mars Féminisme Palestine anti-impérialisme Jeunesse Communiste des Bouches-du-Rhône